Capitaine Afuh «Il faut que les gens pensent à leur sécurité d’abord avant la sûreté de leur biens»
En service dans le corps des sapeurs pompiers depuis près de six ans, le Capitaine Afuh en service dans le 20ème régiment des sapeurs pompiers de Douala est la deuxième personnalité de ce service après le colonel Mikaila. Dans une interview accordée au quotidien La Nouvelle Expression, il revient sur les causes des incendies à répétition dans la capitale économique du Cameroun et d’avantage des incendies meurtriers.

Quelles sont les principales causes des incendies que nous observons dans la ville de Douala aujourd’hui ?
Les causes des incendies à Douala de nos jours sont nombreuses. Parmi elles, les plus principales sont la négligence, l’ignorance, l’inconscience des usagers et des habitants de cette ville. Douala deuxième ville du Cameroun est une ville cosmopolite. Avec sa population grandissante, il est difficile de maîtriser les activités de tout un chacun au quotidien. Avec tout ce que font les gens qui ne prennent même pas en compte des mesures sécuritaires qui accompagnent leurs activités, vous comprenez que le risque d’incendie à Douala doit être grand. Si tous les habitants de la ville prêtaient attention à tout ce qu’ils font au quotidien, on éviterait toutes ces pertes dues aux incendies à répétition que l’on connait ici.
Est-ce que le corps des sapeurs pompiers appelez à intervenir au quotidien s’en sort avec ces incendie à répétition ?
Le corps des sapeurs pompiers est d’abord un corps militaire. Ces éléments sont suffisamment formés pour répondre à toutes les sollicitations et dégager les obstacles qu’ils rencontrent dans le cadre de leurs différentes missions. Il y a certes des difficultés comme dans tous les corps de métier mais on réussit à surmonter ces difficultés et surtout à bien faire ce que nous avons à faire. Nous sommes préparés pour ça. Nous établissons des organigrammes d’intervention de manière quotidienne, hebdomadaire et même mensuelle. Nous sommes à la hauteur de ce que nous faisons. Nous n’avons pas de problème d’effectif. D’ailleurs on peu même avoir cet effectif et ne pas savoir quoi faire avec. Tout est question de l’efficacité. Nous réussissons toujours ce que nous avons à faire. Il faut également comprendre que la réussite d’une mission s’appuie sur le concours de tout le monde. Si la population joue pleinement son rôle, cela signifie tout simplement que notre mission est facilitée.
J’entends le plus souvent dire que les sapeurs pompiers sont en retard durant l’intervention, ou qu’ils ne sont pas venus. Il faut dire que c’est faut. Chaque fois que vous avez eu un agent des sapeurs pompiers au bout du fil et qu’il vous déclare qu’on arrive, c’est qu’ils vont arriver avec quelques minutes de retard normal. Car, il y a une distance qui sépare les sapeurs pompiers du lieu de l’intervention. Et si le retard dont on parle est du au début de l’incendie, il faut dire que c’est un retard normal aussi parce que les incendies sont accidentelles et nous ne pourrons pas être présents au moment où cela déclenche. Parfois certaines personnes tardent à nous informer.
Est-ce qu’on peut avoir la fréquence des incendies dans la ville de Douala ?
On ne peut pas avoir une fréquence nette parce que, ce sont des choses qui surviennent à tout moment. La fréquence est vraiment hasardeuse. A base de nos documents, on peut établir une fréquence mais comme je vous le dis c’est vraiment aléatoire. Il y a des mois où nous faisons 7 à 8 interventions par jours ou par semaine, des moments où on en fait que deux. C’est vraiment aléatoire. Mais, il faut le dire, les interventions c’est tous les jours. Il ne faudrait pas que les populations se bornent seulement sur les incendies parce que c’est alarmant. Le corps des sapeurs pompiers intervient aussi dans les accidents de la circulation, tout ce qui est sources de nuisance à une vie humaine pouvant entrainer la mort. Nous intervenons dans une gamme importante d’autres motifs.
Depuis quelques mois à Douala on fait face aux incendies avec mort d’homme. Comment expliquez-vous cela ?
Les bandits nous ont amené à la protection de nos biens. Ce qui a poussé les Camerounais dans l’ensemble, à mettre en avant la sureté et non la sécurité. Quand ont parle de sureté, on pense d’abord à la protection de biens. Le Camerounais ont érigés des murs de Berlin pour protéger leurs biens et ne pensent pas à eux même. Toutes les portes aujourd’hui sont faites en ferraille. Ce qui fait que lorsqu’un incendie se déclare surtout quand les personnes sont endormies, ils trouvent difficilement le moyen pour ouvrir la porte et sortir. Puisque, tout le local est déjà en fumé et avec la chaleur qui se dégage, ce n’est pas facile. Avant, on laissait la clé sur la porte avant de dormir. Aujourd’hui ce n’est pas le cas. Puisque des gens se disent que le bandit va faire un petit trou sur la porte et ouvrir la porte grâce à la clé qui est là. Conséquence, quand il y a incendie, la clé est difficilement retrouvable et on est victime de son propre piège.
Est ce qu’on peut avoir une idée approximative du nombre de décès suites aux incendies à Douala ?
Ce n’est pas du tout évident de les comptabiliser avec les problèmes d’archivages il n’est pas non plus aisé de vous donner un chiffre exact. Je peux néanmoins vous dire qu’au mois d’avril 2015, nous avons fait une intervention à Mboppi où tous les membres d’une famille de huit personnes sont morts, au mois de mai on a enregistré 4 brulés dans un incendie au carrefour Nbeng skin à New-bell, à la Scdp ce même moi, on a enregistré un mort à Bépanda non loin de la Scdp. En ce mois de juin, on a enregistré au quartier Casmando le 2, trois décès dans un incendie. En l’espace de trois mois, on a enregistré environs14 morts dans les incendies à Douala.
Comment sortir de cette situation là ?
Pour sortir de cette situation dans une ville comme Douala, il faut d’abord habiter dans une maison qu’on a construit soit même en choisissant le bon matériel. Car il y a des matériaux de construction qui, en cas d’incendie, rivalise avec l’essence en matière de combustion. Il ne faut pas surtout construire avec les matériaux de récupération. Il faut également mettre sur pied un bon plan d’urbanisation qui facilitera l’intervention des sapeurs pompiers en cas d’incendie. Ainsi, ils vont le faire de manière prompt tout en limitant aussi les dégâts. Il faut également que les gens arrêtent de penser toujours aux bandits. Qu’ils pensent à leur sécurité d’abord avant de penser à la sureté de leurs biens.
Interview Réalisée par Hervé Villard Njiélé
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