Affaire Ngamo Hamani :La guerre des chiffres paralyse le procès
La guerre des chiffres paralyse le procès
Le ministère public et les avocats de la défense ne se sont pas entendus sur le montant des virements et subventions accordés par l’Etat camerounais à la défunte Camair pendant le procès qui s’est déroulé hier au tribunal de grande instance de Bonanjo.
Renvoyée à la demande des avocats de Ngamo Hamani pour examen des nouvelles pièces introduites dans le dossier par Me Tchakounté Patie, le représentant du ministère des Finances, l’audience programmée hier a effectivement eu lieu. Elle a débutée comme prévue par la « cross examination » c'est-à-dire l’interrogatoire du témoin par les avocats de la défense. Mais seulement le procès qui se déroulait jusque là normalement s’est achevée comme sur un air de dispute. Alors que l’un des avocats de la défense cherchait à savoir et avec insistance, durant l’interrogatoire de Georges Dissack, l’expert financier, s’il y avait deux postes de paiement d’argent à la direction général du trésor du ministère des Finances, le ministère public a objecté en déclarant que son témoin avait déjà répondu à la question. «Objection madame la présidente, mon témoin a déjà répondu à la question. Ce n’est pas parce qu’il n’a pas répondu comme les avocats de la défense le veulent qu’on va s’attarder sur la question », déclare-t-il d’une manière énergique. Pas certains d’avoir entendu le témoin répondre à la question, le juge de la collégialité va alors demander au ministère public de répéter la réponse du témoin pour éclairer la Cour. Dans la réponse, celui-ci va rappeler qu’il n’ya qu’un seul poste de paiement qui est, la paierie général du trésor et que le directeur général du trésor ordonnait uniquement les décaissements.
Cette réponse va susciter une vive réaction du coté des avocats de la défense. Brandissant le rapport des experts qui présente deux sources de paiement d’argent au ministère des Finances, ces derniers vont demander que l’expert justifie cette opération. Face à ses hésitations, le ministère public va une fois de plus tenter de voler à son secours avant d’être rappelé à l’ordre par le juge de la collégialité déjà embarrassé par la tournure que l’audience est entrain de prendre. «Nous ne sommes pas aux réquisitions et plaidoiries, mais à l’audition du témoins. Donc Nous allons avancer » martèle-t-elle.
Parlant des subventions que l’Etat a accordées à la Camair, on constate en consultant le document produit par l’expert que, le Minfi a versé deux fois l’argent à cette entreprise. Le premier, d’un montant de 115.012347532 Fcfa a été payé par la direction générale du trésor et le second d’un montant de 77.487.914.494 Fcfa par la paierie générale. Une chose que les avocats de la défense cherchaient à comprendre puisque, sur le compte de la défunte Camair, on ne retrouve que 73 milliards de Fcfa.
Interpellé une fois de plus par les avocats de la défense qui cherchaient à savoir d’où proviennent les 105 milliards qui figurent sur le rapport et les 118 milliards qu’il y a sur l’ordonnance de renvoie, l’expert Dissack sera une fois de plus embarrassé. Pour tenter de venir en aide au témoin qu’il déclare ne pas substituer, le ministère public va expliquer que ce montant représente la somme des virements que, le trésor public a versé à la Camair ; soit 84 milliards et la somme des autres subventions ou créances directement payées par le trésor public aux entreprises Air France, Asecna, Chanas, pour le compte de la Camair. Ce montant se chiffrerait à 15 milliards à en croire le ministère public. Devant cette nouvelle réaction du ministère public, le président de la collégialité va le rappeler à l’ordre « Nous amorçons une phase déterminante dans ce procès. Laisser le témoin parler. Permettez qu’on avance surtout que Georges. Dissack a été trop patient dans cette affaire.» Rappel le juge avant de signifier à toute l’assistance que l’article 346 du code pénale donne la latitude au juge de prendre les choses en main. « Dans cette affaire, le tribunal se sent obliger par des chiffres et les qualifications », affirme-t-elle. Pendant cette audience qui a duré près de deux heures d’horloges, le juge de la collégialité a également sommé les avocats de la défense de poser rapidement les questions pour qu’on en finisse avec cette étape judicaire. « Vous n’êtes pas obligés de poser toutes les questions que votre client vous demande. Nous sommes tous des juristes et chacun sait ce qu’il cherche. Poser les questions importantes. On n’a pas l’impression que c’est votre client qui est en prison, de part votre manière de procéder », a déclaré le juge. Face à cet embrouillamini né des chiffres que l’expert n’a pas pu justifier séance tenante et compte tenu de l’ambiance peu commode que prenait l’audience, le juge de la collégialité a suspendu le procès pour permettre aux deux parties de se recentrer. L’affaire se poursuit ce matin avec la suite de la « cross examination »
Hervé Villard Njiélé